Les bienfaits du toucher

Cela peut sembler évident, puisque nous sommes des animaux sociaux: le toucher et la proximité physique avec d’autres personnes contribuent à notre santé. Explications.

De quoi parlons-nous

La peau est le premier organe de notre corps en termes de surface. C’est dire l’importance du toucher parmi nos cinq sens. Grâce à la densité élevée de nos récepteurs tactiles, nous pouvons ressentir avec tout notre corps toute une palette de sensations – agréables ou douloureuses. Ainsi, le toucher représente en soi une forme d’expression et de communication. Certains chercheurs, dont l’anthropologue et humaniste anglais Ashley Montagu, ont d’ailleurs postulé qu’il s’agissait d’une dimension vitale de notre personnalité.[1] Et nous ne finissons pas d’en apprendre sur le sujet! En 2021, les chercheurs américains David Julius et Ardem Patapoutian ont reçu le Prix Nobel de médecine pour leurs travaux sur les mécanismes qui permettent aux récepteurs sensoriels de la peau de percevoir la température, le contact et la pression.[2]

Pourquoi nous avons besoin de contact

La peau est une enveloppe qui sépare notre monde intérieur de l’extérieur et c’est pourquoi elle revêt une importance cruciale pour le développement de l’enfant. Selon Ashley Montagu, les caresses d’une mère procurent aux tout-petits un sentiment de sécurité. Quant à Sigmund Freud, fondateur de la psychanalyse, il affirmait que «le Moi est avant tout corporel». En résumé, la personnalité humaine se construirait autour des sensations physiques. 

De nombreux psychologues ont confirmé les bienfaits du toucher pour notre santé mentale. Il est bien connu que les personnes déprimées et suicidaires sont souvent très isolées. La souffrance exprimée par une quantité de personnes durant la pandémie de coronavirus en raison de la privation des contacts sociaux a du reste démontré combien nous avons besoin d’être proches les uns des autres. 

Au-delà de l’effet détente, le contact physique nous permet de prendre conscience de notre corps. Pas étonnant que le toucher soit à la base de nombreuses thérapies dites psychocorporelles. En 2016, la psychothérapeute américaine Virginia Satir, auteure de nombreux ouvrages sur la thérapie familiale, écrivait que nous avons «besoin de quatre câlins par jour pour survivre, de huit pour fonctionner et de douze pour croître».[3] 

Pourquoi le toucher fait du bien

Plus les chercheurs se penchent sur le sujet, plus ils découvrent de bienfaits du toucher: réduction de l’angoisse, atténuation des douleurs, diminution de la pression artérielle, renforcement de l’estime de soi, stimulation du système immunitaire… Comment expliquer cela? Le contact physique active certains circuits nerveux via les récepteurs tactiles situés sous la peau. Puis, le stimulus est transformé par les terminaisons nerveuses en un signal qui est acheminé jusqu’au cerveau, via la moelle épinière et le tronc cérébral. C’est alors que nous réalisons l’effet procuré par le toucher. 

Si la sensation est agréable, la production de cortisol (dite hormone du stress) diminue, tandis que la sécrétion de sérotonine et d'ocytocine augmente. Or, l’ocytocine est associée au bien-être, à la confiance, à l’affection et à l’empathie; elle est notamment impliquée dans l’attachement.[4] Même une accolade de dix secondes suffirait à stimuler la production d’hormones naturelles agissant favorablement sur notre état psychique.

Bon à savoir

Une quantité de méthodes ont été développées au cours des dernières décennies pour redécouvrir ou réapprendre les bienfaits thérapeutiques du toucher. Par exemple, la technique de portage des bébés dite «Kangourou», qui repose sur le contact peau à peau, contre la poitrine. «Cette approche active également les sens de l’odorat et de l’ouïe, puisque le bébé est sensible à l’odeur, à la voix, à la respiration et aux battements de cœur de sa maman ou de son papa. La coïncidence de plusieurs sens favorise la création de nouvelles liaisons cérébrales qui participent au développement cérébral», précise le Pr Riccardo Pfister, médecin-chef du Service de néonatologie et des soins intensifs des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). 

Signe des temps, une «Journée mondiale des câlins» a été lancée en 1986 par un révérend américain, Kevin Zabornev, qui avait constaté que de nombreuses personnes souffraient d’un manque de tendresse physique à certaines périodes de l’année, comme la Saint-Valentin et les fêtes de Noël. Depuis, l’événement se fête tous les 21 janvier. Le principe? Ce jour-là, chacun peut proposer d’offrir à des inconnus une accolade dans un lieu public, en signalant son intention au moyen d’une pancarte portant l’inscription «câlin gratuit» (free hugs en anglais). L’idée a plu, si bien qu’elle a été reprise de nombreuses fois de manière spontanée par certaines personnes, hors du jour initialement dédié à cette initiative.

[1] https://www.seuil.com/ouvrage/la-peau-et-le-toucher-un-premier-langage-ashley-montagu/9782020053075

[2] https://fr.euronews.com/2021/10/04/david-julius-et-ardem-patapoutian-prix-nobel-de-medecine-2021

[3] https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2016/01/20/cinq-raisons-de-ne-pas-delaisser-les-calins_4850703_4497916.html

[4] https://www.css.ch/fr/clients-prives/ma-sante/sante-psychique/stress/toucher-importante.html